Comment prévoir la difficulté à ventiler ?

Le problème de la ventilation difficile, est d'estimer son incidence, d'autant plus que les définitions utilisées dans les diverses publications ne sont pas toujours les mêmes.

Épidémiologie

une fréquence de 0,07% à 1,4% est retrouvée par Lienhart A, et al. Bull Acad natl Med 2004;188:1429-37, Rose DK, et al. Can J Anaesth 1994;41:372-83 Asai T, et al. Br J Anaesth 1998;80:767-75

Dans une analyse rétrospective, Willamson retrouve une fréquence allant jusque 15% (Williamson JA, et al. Anaesth Intensive Care 1993;21:602-7.

57% des intubations difficiles sont non-anticipée D'après Asai T, et al. Br J Anaesth 1998;80:767-75

Définition

si l'on suit la conférence d'experts de la SFAR de 2006, une ventilation est dite difficile s'il est impossible d'obtenir

  • une ampliation thoracique suffisante
  • un volume courant supérieur à l'espace Mort (3 ml par kilo)
  • un capnogramme identifiable
  • de maintenir une saturation périphérique en oxygène> 92 %
  • s'il est nécessaire d'utiliser l'oxygène rapide à plusieurs reprises, ou d'appeler un autre opérateur
  • si la pression est supérieure à 25 cm d'eau

OU

l'ASA dans ses guides lines, (ASA. Practice Guidelines for management of the difficult airway. Anesthesiology 1993;78:597-602) reprend l'échelle suivante

0

 

 

++++

 

facile sans artifice
+ soulever le menton
+ maintenir l’étanchéité ET luxer la machoîre inférieure
+ canule oro et/ou nasopharyngée
+ 2 opérateurs
ventilation impossible

 

Quel est l'importance clinique de la ventilation difficile ?

Il faut distinguer deux situations,

La situation la plus critique est représenté par l'impossibilité d'intuber une impossibilité de ventiler. L'incidence de cette situation est estimée généralement entre 0,01 et 2 pour 10000 patients. Pour Langeron, c'est incidence est de 1,5 %.

L'estimation de l'importance clinique de ses difficultés de ventilation au masque est donc difficile à préciser en l'état actuel des connaissances.

L'étude de Langeron (Prediction of difficult mask ventilation. Langeron O, et al. Anesthesiology 2000;92:1229-3) est particulièrement intéressante signalée, elle concerne un gros collectif de 1502 patients opérés de chirurgie générale, la chirurgie O.R.L. et maxillo-faciale est exclue de cette étude, puisqu'elle est classiquement associée à des difficultés d'intubation particulières. les patients opérés sous anesthésie locorégionale, après induction en séquence rapide, ou bénéficiant d'une intubation sous ses nations sont également exclus de l'étude.

Dans cette étude, la position amendée de Jackson est utilisée systématiquement lors de l'intubation, les patients bénéficient tous d'une préoxygénation de quatre minutes, la définition de l'intubation difficile retenue est la suivante : plus de deux tentatives sous laryngoscopie ou une durée d'intubation supérieure à 10 minutes.

Les critères retenus dans cette étude pour définir la ventilation difficile aux masques sont les suivants :

Les critères retenus dans la définition sont donc ici en partie subjectifs.

La fréquence globale de Ventilation Difficile est de 5% (IC = 3,9 - 6,1%) ce qui représente 75 personnes. Les auteurs ont noté un seul cas de ventilation impossible.

17% des cas de ventilation difficile étaient prévus par l’examen pré-opératoire (n=75) . mais 56 cas prévus comme potentiellement difficile se sont ans en réalité révélés comme étant des cas ne posant pas de problème. ( Se=17% Sp=96% VPP=19% VPN=96%)

En conclusion les critères sont spécifiques et peu sensibles

Facteurs de risque retenus (par analyse multivariée) : sont

Variables Odds-Ratio (95%, IC) p
présence d’une barbe 3,18 (1,39-7,27) 0,0006
IMC > 26 kg/m2 2,75 (1,64-4,62) < 0,001
édenté 2,28 (1,26-4,10) 0,006
age > 55 ans 2,26 (1,34-3,81) 0,002
Histoire de ronflement 1,84 (1,09-3,10) 0,02

En poolant pour obtenir le score de prédiction de VD, l'auteur conclu que si 2 critères sont présents (Se=72%, Sp=73%, VPP=12%, VPN=98%) , on obtient une valeur prédictive utilisable en clinique si le patient présente deux des. cinq critères.

1374 sur les 1502 inclus dans l'étude ont été intubés

Cormack et Lehane
pas de ventilation difficile
n=1305
ventilation difficile
n= 69
p incidence
1
987 (76%)
31 (45%)
2
205 (16%)
14 (20%)
< 0,001*
3
80 (6%)
12 (17%)
4
33 (2%)
12 (17%)
Intubation difficile
106 (8%)
21 (30%) x4
<0,001
1,5%
Intubation impossible
7 (0,5%)
4 (6%) x12
0,001
0,3%

* : entre Cormack 1 et 2 et Cormack 3 et 4

Conclusion : la présence de patient difficiles à intuber est statistiquement plus importante dans le groupe où la ventilation est difficile